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Il ne les fait pas mais il a bel et bien 100 ans puisqu’il est né en 1916, en pleine 1ère guerre mondiale, parce qu’il la réprouvait et qu’il voulait que cela se sache : non, tous les Français d’alors n’étaient pas des va-t-en guerre ! La fibre antimilitariste du Canard n’a pas faibli depuis sa création, l’esprit d’indépendance non plus : le journal est la propriété de ses seuls salariés et fondateurs et entend bien le rester à l’heure où la presse française, paupérisée depuis plusieurs décennies, est dramatiquement perfusée par les subventions de l’Etat, cannibalisée par les industriels de tous poils, mise au pas par les annonceurs et «empêchée» par les communicants, nouvelle engeance prédatrice et invasive du moment…

Mercredi soir à la BPI, c’est toute une assemblée de têtes chenues (les journalistes et dessinateurs du Canard n’ont pas 100 ans mais… presque) qui est venue fêter l’événement et réaffirmer la nécessité de son indépendance, ingrédient clef de sa longévité et de sa liberté de ton. Le dessin se veut satirique, plus que la plume qui marie bons mots et rigueur (chaque information est largement pesée avant d’être consignée ; une affaire ne sortira pas si sa mise au jour représente un quelconque risque pour la sécurité d’une personne).

La contrepèterie demeure reine (« Rondot dément ses fiches ») et les esprits frondeurs allergiques à toute distinction honorifique : un contributeur régulier du Canard se vit ainsi interdit de tribune par le fondateur du journal Maurice Maréchal en 1933 parce qu’il avait eu le tort d’obtenir la légion d’honneur (qu’il n’avait qu’à pas mériter !)…

Lectures, visionnage et visite de circonstance :

Aux quatre coin-coins du Canard : documentaire de 3h tourné dans les années 80 pour les 70 ans du Canard par Bernard Baissat

Liberté d’expression, L’état d’urgence, les dossiers du Canard Enchaîné, cahier spécial d’avril 2016

Un si petit Monde d’Odile Benyahia-Kouider, journaliste passée par Le Monde puis Le Nouvel Obs, tour à tour rachetés par le trio Bergé-Niel-Pigasse, et désormais journaliste au Canard où elle est venue retrouver l’indépendance qui lui est chère

Main basse sur l’information de Laurent Mauduit, cofondateur de Mediapart : à quelques exagérations et formules inutilement dramatiques près, ouvrage édifiant sur l’inféodation des médias français aux puissances financières et industrielles

Le monde libre de Aude Lancelin : l’ex directrice adjointe de L’Obs, évincée fort peu élégamment par les nouveaux propriétaires du journal, a bien des raisons d’en dresser un portrait à charge… (le parti pris de rebaptiser certains des acteurs clés de son éviction affaiblit cependant quelque peu son propos)

Exposition Moisan (1907-1987), un caricaturiste en son siècle au Musée d’Art et d’Histoire de Meudon jusqu’au 20 novembre : le dessinateur emblématique du Canard voulait « réhabiliter les gens par la caricature »